À l'issue d'une nuit d'émeutes, le haut-commissaire de la République Louis Le Franc, a décrété le couvre-feu pour la nuit de mardi à mercredi dans l'agglomération de Nouméa. "On n'a pas de morts, il n'y a pas de blessés graves pour l'instant, il y aurait pu y en avoir", a-t-il déclaré tout en appelant au calme. Un appel également lancé par le président indépendantiste du gouvernement du territoire Louis Mapou.
Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin a annoncé que 82 personnes ont été interpellées dimanche et lundi et a "condamné de façon extrêmement forte ces violences", les qualifiants d'"émeutes commises par des délinquants, parfois des criminels".
Au total, 54 gendarmes et policiers ont été blessés, certains "gravement", a ajouté M. Darmanin, précisant que des familles de gendarmes avaient été évacuées. Parmi les unités mobiles les plus touchées figurent l'EGM 35/7 de Revigny-sur-Ornain (Meuse).
Louis Le Franc a rapporté des tirs tendus avec des armes de gros calibre, des carabines de grande chasse, sur les gendarmes dans la nuit de lundi à mardi dans la commune du Mont-Dore, au sud-est de Nouméa. Dans les quartiers nord de Nouméa, il a relevé des destructions de commerces, de pharmacies et de domiciles, ajoutant : "On a malheureusement pu constater des exfiltrations d'habitants de leur domicile pour qu'ensuite leur domicile soit brûlé".
Des gendarmes du GIGN ont dû intervenir pour secourir de sa maison en flammes le père, âgé de 81 ans, de Sonia Backès, la présidente de la province sud de l'archipel, ancienne secrétaire d'Etat et principale figure du camp non-indépendantiste. Il y a une antenne GIGN (AGIGN) à Nouméa, forte d'une quarantaine de gendarmes. Quinze équipiers du GIGN central de Satory sont arrivés mardi sur l'île en renfort. Selon les informations de L'Essor, 47 gendarmes d'élite supplémentaires, provenant du GIGN central et d'antennes vont les rejoindre. Au total, les renforts de gendarmes du GIGN s'élèvent donc à 62.
" Nous avons été confrontés depuis plus de vingt-quatre heures à un vrai déchaînement de haine, un déferlement de jeunes souvent alcoolisés, manifestement manipulés et d'une violence assez inouïe", a déploré le général Nicolas Matthéos, commandant de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie. Des brigades de gendarmerie ont été attaquées, a ajouté le général Matthéos, évoquant des émeutiers essayant de pénétrer dans les lieux avec des sabres, des caillassages et des tirs.
Des renforts importants son en cours d'acheminement vers Nouméa : quatre escadrons de gendarmes mobiles (EGM), deux sections de la CRS 8, une unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines. Sept escadrons de gendarmerie sont sur place, contre trois à quatre en temps normal.
Les tirs contre les gendarmes avec des armes de chasse de gros calibre rappellent les épisodes au cours desquels de gendarmes ont été tués en Nouvelle-Calédonie. Comme en avril 1988 où quatre gendarmes avaient été tués par un commando indépendantiste lors de l'attaque de la brigade de Fayaoué sur l'île d'Ouvéa.
Pa ailleurs, une trentaine de commerces, d'usines, d'entreprises ou de concessions automobiles ont été incendiés et des supermarchés pillés. Les sapeurs-pompiers de Nouméa ont dit avoir reçu près de 1.500 appels dans la nuit de lundi à mardi et être intervenus sur environ 200 feux.
Mardi, les rues de Nouméa et de sa banlieue étaient parsemées de carcasses de voitures incendiées et débris fumants de pneus et de palettes de bois, avec de nombreuses barricades encore actives. Tout rassemblement a été interdit dans le grand Nouméa, de même que le port d'armes et la vente d'alcool dans l'ensemble de l'archipel, a annoncé le haut-commissariat qui a invité les 270.000 habitants de Nouvelle-Calédonie à rester chez eux.
Les lycées et les collèges ont été fermés jusqu'à nouvel ordre ainsi que l'aéroport international. de la Tontouta.